Bilan de la Sécurité Routière 2009 Si vous ne savez pas quoi dire, dites du mal des motards !

Lors de sa conférence de presse du 29 juillet, la Direction de la Sécurité et de la Circulation Routières (DSCR) a présenté le bilan définitif pour l’année 2009 en matière de sécurité routière. Et lors de cette conférence, comme il est d’usage, les usagers de 2 roues motorisés (2RM) ont été pointés du doigt pour justifier les mauvais résultats. En effet, l’année 2009 a vu le nombre de tués sur les routes stagner par rapport à 2008, et dans sa communication, la DSCR n’a pas manqué d’affirmer que sans les 2 roues motorisés, le nombre de tués aurait baissé. Un peu comme si on disait que si les vacanciers allaient à la montagne au lieu d’aller au bord de la mer, il y aurait moins de noyés...

Comme à son habitude, la DSCR a rappelé son chiffre fétiche : les 2RM représentent 2% du trafic et 25% des tués. D’où sortent ces 2% ? Mystère car en fait personne ne sait précisément combien de 2 roues circulent en France. Pour preuve, il y a 2 fois plus de motos assurées que ce que recense la DSCR. De la statistique au doigt mouillé quoi. Ou alors, ce fameux chiffre fétiche vient d’un tableau affiché au mur de la déléguée interministérielle depuis 10 ans sans jamais avoir été réactualisé. Car même avec les chiffres sous-estimés de la DSCR, le nombre de motos augmente de 5% en moyenne par an, largement plus que les automobiles par exemple. Ce qui relativise l’aggravation du risque supposé chez les conducteurs de 2RM. Risque que la DSCR attribue au comportement des motards, alors que les statistiques démontrent que les motards ont moins d’accidents responsables que les automobilistes.

Une autre catégorie d’usagers présente des résultats similaires aux 2RM, les cyclistes. Hausse du nombre de tués liée à la hausse du nombre de pratiquants. Mais là, étrangement, le ton de la DSCR est tout à fait différent puisqu’elle n’oublie pas de signaler cette hausse du nombre de pratiquants. Selon que vous serez un voyou en moto ou un bobo en vélo…

Au final, on peut tout de même déduire que ces 2 catégories d’usagers vulnérables bénéficient moins de la baisse du nombre de tués sur les routes parce que les réponses apportées par le gouvernement sont inadaptées aux risques particuliers rencontrés, notamment en terme de prise en compte par les autres usagers.

Un autre point prête à sourire : le taux de port du casque. Selon la DSCR, 100% des cyclomotoristes portent le casque alors que seuls 92% des motards le portent. 8% des motards qui roulent sans casque, cela laisse songeur car très éloigné de ce qu’on constate au quotidien. Par contre, il est très fréquente de croiser des cyclomotoristes dont le casque n’est pas correctement attaché. De là à se dire que nos chers technocrates ont du mal à différencier un cyclomoteur d’une moto, il n’y a qu’un pas.

De la même manière, suite à cette conférence de presse, les journaux télévisés n’ont diffusé que des images de ces "inconscients de motards" qui roulent sans équipement adéquat (blouson, gants, pantalon et bottes), notamment dans le sud. Et là, c’est l’ensemble du Mouvement FFMC qui apporte ses réponses : la FFMC Loisirs qui sensibilise les minots, l’AFDM les candidats aux permis, Moto Magazine qui teste les vêtements de protection et dont les essayeurs roulent systématiquement équipés, la Mutuelle des Motards qui prend en charge 100€ sur l’équipement des jeunes permis et enfin la FFMC qui réclame une aide fiscale (baisse de la TVA ou crédit d’impôt). Car un équipement adapté, cela coute cher, alors s’il faut en plus une deuxième tenue pour les jours de fortes chaleurs, cela représente forcément un frein pour les personnes les moins aisées. Donc si le gouvernement s’inquiète tant que ça du port des vêtements des protection, il peut toujours mettre au calendrier le vote de la proposition de loi du député Jean-Pierre Nicolas. De même, lorsque les policiers de Nice viennent faire la morale aux usagers de 2RM, on peut se poser des questions sur leur crédibilité puisque, jusqu’à récemment, leur propre équipement était dérisoire.

Concernant le sur-risque que présentent les jeunes, là aussi c’est l’ensemble du Mouvement FFMC qui apporte des réponses, notamment avec son programme d’Education Routière de la Jeunesse et 2 Roues Motorisés (agréé par le Ministère de l’Education Nationale) et ses militants qui interviennent dans les établissements scolaires pour sensibiliser des milliers d’adolescents, sans leçon de morale ni menaces de pv.

Abordant la typologie du réseau routier, la DSCR rappelle que le réseau autoroutier reste le plus sûr tandis que les routes départementales restent les plus dangereuses. Alors pourquoi les contrôles sont-ils ciblés sur les grands axes si ce n’est par souci de rentabilité ? On imagine en effet que si on poste des gendarmes sur une petite route de campagne, fortement accidentogène mais peu fréquentée, le carnet à souche ne va pas se remplir très rapidement. Pas bon pour les caisses de l’Etat ! On peut aussi rappeler que les tarifs prohibitifs pratiqués par les sociétés d’autoroutes limitent leur accès aux usagers, opérant ainsi une sélection par l’argent sur l’accès au réseau sécurisé. Et ce phénomène s’est encore aggravé suite à la privatisation des sociétés d’autoroutes, jamais à cours de coups tordus pour racketter l’usager en contournant la réglementation, comme l’a récemment dénoncé 40 Millions d’Automobilistes.

Alors quelles perspectives pour 2010 ? La DSCR annonce déjà de bons chiffres pour les 6 premiers mois de 2010. Enfin bon, tout est relatif car ils sont comparés aux 6 premiers mois de 2009, qui furent catastrophiques (+32% de tués par rapport à 2008). Du coté des motards, les 6 premiers mois voient le nombre de tués baisser de 29%. Mais chut, faut pas le dire trop fort, la DSCR ne voudrait surtout pas dire du bien des motards !

Alors le gouvernement propose toujours le même cocktail : de la prévention (mais pas trop) et de la répression (un maximum). Ils annoncent des forces de l’ordre visibles lors des grandes migrations estivales (ah bon, ils vont arrêter de se cacher pour piéger l’usager ?), une attention particulière aux 2 roues motorisés (on n’en demandait pas tant !) et aux étrangers (comme quoi, le manque de civisme n’est pas l’apanage des Français). Des contrôles sur les aires de repos des autoroutes, où assurément, il y a beaucoup de morts. Bref, les points vont continuer à tomber. Le seul point positif annoncé reste le renforcement de la concertation du 2 roues motorisé. Et si on appliquait ce qui a déjà été acté (voir le bilan des 6 mois de concertation) ?